38km, 2h12.
Monfalcone, Duino, Trieste.
Aujourd’hui, direction Trieste le long de la côte du Golfe éponyme. Le long de la route, je visite l’église de San Giovanni in Tuba, construite au quatrième siècle pour contenir des reliques et agrandie à la suite de son succès avec les pélerins. À l’intérieur de l’ église, on peut apercevoir le bâtiment original avant l’agrandissement, qui est recouvert de plantes sous la lumière du soleil qui pénètre par les vitres. Un lieu beau et mystique, dont le jardin et les petites cascades amènent sérénité et calme.
Je continue mon chemin. À Duino, un château qui avait l’air bien beau et qui sera à visiter une autre fois. La route s’élève un petit peu plus au-dessus du niveau de la mer, et il y a une belle vue ensoleillée sur tout le golfe.
Puis en arrivant près de Trieste, j’aperçois le château de Miramare, duquel j’essaie de m’approcher, mais c’est interdit aux vélos. Les voitures, elles, peuvent passer en payant le parking. On retiendra la leçon; venez en voiture, surtout pas en vélo. Cynisme mis de côté, j’accepte que ce n’ est que partie remise. Je continue donc la route et aperçois bientôt le phare de Trieste, en surplomb. Celui-là même que j’avais vu scintiller hier soir sous le nuage menaçant, depuis l’autre côté du Golfe.
Longue colonne surmontée d’une statue en cuivre représentant la Victoire ailée, le Faro della Vittoria annonce mon arrivée dans Trieste, dernière ville d’Italie du nord-est, et aussi ville de l’extrême sud d’Europe centrale, qui marque le début de mon voyage dans les Balkans. À première vue déjà, Trieste ne ressemble pas aux autres villes italiennes que j’ai pu visiter, et c’est parce que c’est une ville à l’histoire complexe de par sa stratégique position géographique. D’abord ville romaine, puis du Premier Empire, elle fût ensuite le seul point de contact de l’empire avec la Mer Méditerranée de l’empire austro-hongrois. Rattachée ensuite à l’Italie, elle est donc un beau mélange des mondes latin, germanique et slave.
Je trouve une jolie auberge de jeunesse sur le côté sud de la ville, à la Piazza Venezia, ControVento, et réserve deux nuits. Ils sont dans un ancien bâtiment du début du XIXe siècle qu’ils ont retapé en auberge de jeunesse en conservant l’architecture originale. Le décor est coloré, propre, et des plantes agrémentent le tout. Je prends une douche et pose mes affaires dans le dortoir à trois, dont je me trouve être le seul occupant, puis sors manger chez Melograno, un très joli restaurant au décor chaud qui propose plusieurs options végétariennes. Vraiment bon. Je croque quelques objets au stylo, m’entrainant toujours au dessin, désastreusement, mais je m’y essaie. One step at a time. Un peu comme mon chemin pour l’Inde, un peu comme tout projet dans la vie. Je sais que malgré qu’il arrive qu’on surestime ce qu’il est possible de faire en un jour, on sous-estime souvent de quoi on est capable sur le long terme. Et de toute façon, j’adore ça.
Ensuite, je vais visiter le musée d’art oriental, un musée civique qui regroupe différentes pièces ramenées lors d’expéditions italiennes en Chine et au Japon. Au premier étage, des œuvres Gandhara, une région que je ne connaissais même pas jusqu’à aujourd’hui. Située sur le territoire où se trouve aujourd’hui le Pakistan et l’Afghanistan, cette région était une grande croisée de l’ancienne route de la soie, et a mêlé l’art bouddhiste et l’art gréco-romain. Plusieurs pièces sont disposées dans le musée. Au deuxième étage, une collection d’objets de Chine tel que des habits en soie, des cerfs-volants, des vases, assiettes, bols, et autres éléments en porcelaine, polychromes ou en blanc et bleu, avec des détails incroyables sur les peintures. Plus haut, on passe aux objets japonais, avec de la céramique, des petites tasses de saké décorées toutes mignonnes, des peintures sur papier, et enfin des sabres et d’autres armes. Charmante petite visite qui me donne un petit avant-goût à travers une très longue lunette sur les cultures vers lesquelles je me dirige.
Après le musée, je prends le bus numéro 6 pour me rendre au Castello di Miramare, résidence de l’archiduc Maximilian, qu’il a fait construire vers 1850 dans un style étonnant de gothique-roman-renaissance. En y arrivant sur la route qui longe la mer, on traverse d’abord une large porte en forme d’arche, placée là pour couper la Bora, le fameux vent provenant du nord-est qui souffle violemment sur toute la région, principalement en hiver. Puis en continuant la marche se dévoile bientôt le château, tout au bord de l’eau.
Je visite l’intérieur, grandiose. Une partie du premier étage a été agencé pour ressembler à l’intérieur d’une cabine de bateau. Murs en bois, carpette, motifs d’ananas, d’ancres et de couronnes, etc. Avec la mer juste à côté, on s’y croirait vraiment ! Une des salles contient une splendide bibliothèque, détenue par l’archiduc et sa femme, la princesse de Belgique. Au-dessus des rayons, il y a les lettres de l’alphabet pour classer les livres, qui ont été gardés dans leur position d’origine comme organisés par le couple. J’essaie de trouver des œuvres que je reconnaîtrais.
Puis je fais un tour du parc, qui s’étend derrière le bâtiment dans des chemins sinueux, sous un ciel incertain et spectaculaire; c’est l’heure dorée, les rayons du soleil aspergent d’or le jardin, mais des nuages menaçants percutent ce décor lumineux. Remarquant que les oiseaux volent hauts dans le ciel, je ne me soucie pas d’une pluie potentielle. Au retour, je recroise des étudiants qui avaient pris le même bus que moi en venant. Ils m’invitent à manger avec eux plus tard à un festival de nourriture de rue qui se déroule le long du Canal Grande di Trieste, mais je refuse car je me sens bien trop fatigué. Souper au Barattelo, un vieux restaurant familial, où je me régale. Retourné à l’auberge de jeunesse, je nettoie ma sacoche de nourriture/cuisine, où s’est renversé de l’huile d’olive de mon bocal de pomodoro secchi ainsi qu’une tomate que je conservais depuis quelques jours et qui a été écrasée. Un joli chenil. Dans la cuisine, je rencontre ensuite Mijntje, une jeune femme hollandaise qui voyage une demi année avant de commencer ses études de médecine, et Sébastien, un français qui voyage comme moi à vélo, en Europe, durant son année sabbatique entre des études d’astrophysique. Il a une guitare avec lui, qu’il transporte sur son vélo, et joue dans la rue principalement pour rencontrer des gens, mais ça lui rapporte aussi parfois un peu d’argent, qu’il peut ajouter au budget de son voyage. Je l’envie, d’avoir un instrument plus léger qu’un piano, mais aussi d’avoir ce qu’il faut pour jouer en public en demandant de l’argent. Très chouette type qui continue maintenant sa route jusqu’à Budapest où il essayera d’apprendre le hongrois. On remarque qu’il est minuit passée et on sonne la fin de la journée.
Le blog de Sébastien: https://voyagedesebas.blogspot.com/