68km, 4h17.
Makarska, Ploče, Trpanj.
Me repose jusqu’en début d’après-midi, je ne suis pas au meilleur de ma forme. Malade et un peu honteux de l’être de nouveau. J’ai dû attraper un rhinovirus et le peu de sommeil n’a pas aidé mon système immunitaire à le combattre. En plus, aujourd’hui il pleut, d’abord de façon intermittente, j’enlève et je remets ma panopluie, puis une grosse pluie me prend par surprise, je ne trouve pas le temps de mettre mes habits imperméables, je suis trempé. Au moins, il ne fait pas trop froid. La voix de mon médecin de famille résonne en moi: « Souviens-toi de tes ancêtres Irlandais… » , eux qui devaient morfler dans les champs sous n’importe quelle condition et qui ont traversé une famine, ils n’avaient pas le temps de se reposer au moindre mal; il préconise donc toujours de se pousser et de ne pas se reposer « au moindre bobo » comme le veut de plus en plus la dogme actuelle, mais de s’arrêter totalement dès que ça ne va vraiment pas.
J’ai envie de prendre le ferry à Ploče, comme ça c’est fait aujourd’hui, et pour arriver à temps à librairie de Korčula. Le dernier est à 19h30. À un moment je ne pensais pas que j’allais y arriver, c’était donc la course, mais je suis finalement arrivé quelques minutes avant le départ, complètement exténué, défoncé, trempé par-dessus et par-dessous mes habits. Je suis dans un piteux état. Dans le ferry jusqu’à Trpanj, qui prend une heure, je mange et écoute la sonate numéro 18 en sol majeur de Schubert, qui me réconforte depuis avant-hier.
Dans le ferry, il y a un grand groupe de jeunes très excités et animés avec des sacs à dos et des sacs de couchage, et en sortant ils tentent tous de faire de l’auto-stop dans la nuit pour les voitures qui sortent du ferry. Je propose à un d’eux de monter derrière mon véhicule. Ce sont des Polonais qui font une course depuis chez eux entièrement en auto-stop pour arriver à un festival en Croatie. Ils en sont ici à leurs derniers kilomètres. Moi, j’ai pris une chambre d’hôtel au Faraon, juste à côté du port. Grand immeuble opportunément placé près du port et de la plage, large réception, restaurant attaché, le vrai type d’hôtel balnéaire, construit il y a peut-être une quarantaine d’année, qui commence à se faire vieillot, à se défricher; il aurait bien besoin d’une petite rénovation, on le voit en arrivant à la façade déjà. Nuitée au bas tarif, mais beaucoup d’ennuis, pour moi qui ne reste qu’une nuit et voulait simplement un lieu pour me reposer et récupérer: il faut monter cent septante-et-une marche d’escalier (comme l’ont compté et fait remarqué plusieurs internautes dans les avis, ce que j’ai remarqué trop tard) pour accéder aux chambres, aux deuxième étage dans le bâtiment derrière la réception, surélevé, pas d’ascenseur, Pour monter toutes mes affaires, trois aller-retours donc, puis je suis finalement dans la chambre, petite, maigre, puante: odeur de fumée incrustée dans les murs décrépis et dans le linoléum qui s’effiloche misérablement, un lit au drap plus-trop-blanc, une table de nuit encombrée d’un téléphone âgé. Ça me rappelle le motel de Knin, mais ce dernier au moins assumait son rôle, se voulait une atmosphère glauque. Ici, on veut se croire ce qu’on n’est pas. Le code Wi-Fi n’est pas donné dans la chambre, j’essaie d’appeler la réception avec le combiné, mais c’est déconnecté. Je dois redescendre les cent septante-et-une marches une quatrième fois, passer par l’extérieur sous la pluie, demander le mot de passe et tenter de questionner à propos de l’utilité d’un téléphone déconnecté, puis tout remonter. La lampe principale ne fonctionne pas. J’essaie de fermer les stores pour demain matin, mais leurs plaquettes en bois sont inclinées de façon à laisser passer autant de lumière que sans eux, ils ne servent donc à rien. Leur restaurant ferme à vingt-et-une heure, je trouve le seul autre endroit où manger: une pizza chez Joja, très bonne. Puis au lit. À trois heures du matin, je suis réveillé par un monstre bruit. Dans un demi état de sommeil, je ne comprends d’abord pas d’où ça vient, je pense que c’est la climatisation, ou un réfrigérateur, mais il n’y en avait pas. Confus, je me lève et me déplace dans la chambre, en plus je n’ai qu’une réception physiologique mono des sons, je tourne dans tous les sens, cherchant l’origine du boucan, c’est un roulement assourdissant qui devient de plus en plus fort. J’ouvre la fenêtre et suis présenté face au vacarme ahurissant qui résonne devant tout l’immeuble, et je vois des étincelles s’échapper d’une ventilation sur le toit ainsi qu’une petite fumée. Le boucan est tel que même les fenêtres fermées et l’avantage contextuel d’une oreille nulle, simplement impossible de dormir. Je dois donc m’habiller pour descendre les on-sait-combien marches, réception vingt-quatre heures sur vingt-quatre auquel personne ne se trouve, à part un autre client mécontent. On sonne, on toque, on attend. Puis quelqu’un arrive, d’abord ne nous prend pas au sérieux, mais non rien n’est cassé, mais si madame, je vois des étincelles. On vérifie la cuisine et en effet quelqu’un avait oublié d’éteindre un interrupteur. Remontée des fameuses marches jusqu’à la chambre et au lit.
2 réponses sur « Lundi 2 mai 2022 »
Terrible day. I’m so sorry.
It was not an easy day when I was living it, but in the creation of my souvenirs, as the experience started subliming into a memory, it became an adventurous day that is worth the remembering and the telling😃 thanks for your kind words!