Mardi 26 avril 2022

51km, 3h02.

Sinj, Split.

Pour le petit-déjeuner, je mange des flocons d’avoine que j’ai laissé tremper dans du lait de soja pendant la nuit, et par-dessus lequel je saupoudre de la cannelle et des kakao nibs. Honnêtement un vrai délice, sans avoir besoin de chauffer quoi que ce soit. Je prépare lentement mes sacs puis reprends la route pour des nouvelles aventures.

Le paysage est toujours très monteux et le chemin zigzag en trouvant le chemin le plus optimalement plat pour se rendre à la grande ville de Split sur la côte. Je trouve un café pour aller aux toilettes et fais une petite pause devant, où un ancien vétéran en habits militaires fume et bois des bouteilles de bière en se ravitaillant au Studenac jouxtant le café. Il se nomme à tour de rôle Torzilla ou OTAN, et scande la mort de la Russie, visiblement embêté et torturé par ce qui se passe en Ukraine. Je passe ensuite rapidement par Sinj. La route qu’empruntent David et Luis pour arriver à Split, où l’on va finalement se rencontrer, rejoint mon propre tracé un peu plus loin. Je m’y arrête donc et croque des carottes avec l’espoir qu’ils passent là au même moment, mais pas de chance, je continue donc. Longue descente ensuite, je vois d’abord la mer qui apparaît entre les montagnes, puis la grande métropole de Split. Arrivé au centre, je regarde la liste des auberges de jeunesse et comprends immédiatement que Split est une ville fêtarde: Booze and Snooze, Fiesta Siesta, ainsi que d’autres noms évocateurs. J’opte pour le Tchaikovsky, qui me parle plus. Je m’y installe et rencontre d’autres voyageurs, c’est quatre dortoirs sur un étage, plutôt petit mais convivial. L’hôte, Steven, est très accueillant et extraverti, bien dans son rôle de maître d’auberge.

J’ai plusieurs mission à remplir à Split: récolte de ma poste restante; écriture de mon journal qui prend inexorablement du retard; passage à Décathlon et un autre magasin de sport pour plusieurs accessoires: filtre à eau pour la Bosnie et d’autre pays futures, coussin gonflable (et me débarrasser du deuxième pull que j’utilisais jusqu’ici pour ma nuque sous la tente), gants de cyclistes d’été, sacs pour compartimenter mes affaires dans les sacoches; quelques affaires administratives; et finalement, essayer de trouver une solution pour récupérer mes deux bracelets que j’ai oublié près de l’église ce matin en partant.

Je récupère d’abord ma poste restante. Au guichet, on me donne une lettre de Clémence, la seule que j’attendais, puis je demande, juste pour être sûr, « seulement un ? » avec un faux air perplexe. On retourne à l’arrière pour vérifier, et ils ramènent un petit colis avec une épaisseur qui insinue un contenu matériel. Surpris et excité, je fonce au café D16, commande un sencha et ouvre le colis pour trouver une lettre d’Anita accompagné de Ragusa! Un avant-goût de Dubrovnik déguisé en retour en Suisse, très joli ! J’écris un peu mon journal, et David et Luis me rejoignent plus tard. Enfin se voit-on ! Eux sont partis de Stuttgart une semaine après moi, et c’est Sébastien à Trieste qui nous a mis en contact. Ils ont dix-neuf ans et veulent aussi aller en Inde et plus loin ! On se parlait donc par WhatsApp, nos chemins tantôt s’éloignaient légèrement, se rapprochaient ou se croisaient presque autour de Krka, et nous voici finalement. Et encore mieux: en passant à Décathlon plus tôt, ils ont rencontré Nathan, un Hollandais qui va au Kyrgyzstan, qui lui a rencontré deux autres allemands qui vont jusqu’en Turquie. On se voit tous à 20h. Nous voici donc six jeunes cyclistes tous partis d’Europe centrale pour l’Asie, sur le quai de Split, multiples tranches de pizza en main et grandes bouteilles de bière au pamplemousse à partager. Nathan nous rapporte ce qu’un hôte WarmShowers a deviné de lui il y a quelques jours: « Si tu vas en Asie à vélo, c’est que tu es ingénieur en génie électrique ou mécanique, tu penches bien à gauche sur le spectre politique, tu as une sensibilité pour le droit des animaux et que tu aimes Game of Thrones. » Éclats de rire, car c’est en effet à peu d’exceptions près notre profil à tous les six. Comme quoi, on croit toujours être unique et spécial, mais on retombe toujours dans un groupe où sous-groupe social définit sociologiquement sans même le savoir, explique nos comportements. Drôle, drôle. Luis et David, inspirés par mon blog, ont créé le leur au nom de bikingtoasia.com. On échange nos réponses à tour de rôle à propos de questions concernant notre voyage et tout ce qui s’y rapporte. Chacun à sa petite manière de faire ci ou ça, mais on prend aussi volontiers les conseils ou idées des autres. Ils repartent tous tôt demain matin donc « on ne deviendra pas plus vieux ce soir », comme l’expression germanophone le dit si bien.

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