51km, 3h16
Lausanne, Vevey, Montreux, Villeneuve, Noville.
À mon réveil, je remarque que le soleil brille à l’extérieur. Une belle journée pour conquérir le monde, me dis-je. Tous derniers préparatifs. Je mets les dernières choses dans mes quatre sacoches jaunes pétants et les ferme une à une avant de les placer sur mon vélo. J’ai comme une boule au ventre. Je ressens une légère anxiété venant de mon inconscient, même si je me sens prêt et sûr de moi. À midi, accompagné de Anda, Lucas et Simon, déplacement jusqu’au parc de Montbenon, où j’ai décidé de faire mon départ officiel. On y retrouve Arpad, qui va faire le début de la journée avec moi sur son vélo de course. Le ciel est partiellement couvert, mais le soleil jette sa lumière sur la ville. C’est un dimanche, Lausanne est calme, il n’y pas beaucoup d’activité dans les rues et on peut entendre les oiseaux chanter. C’est comme un timide début de printemps. Il fait même assez bon, et j’enlève le legging que je pensais devoir porter. Petite séance photo, de nous, de moi, sur l’esplanade du parc. Derniers adieux, quelques larmes, puis Arpad et moi nous en allons. Malgré le calme de la scène, je sais qu’elle restera gravée en moi, à cause de l’intensité de ce que je ressens dans mon esprit durant ce moment de conscience là.
Descente tout droit jusqu’à Ouchy, puis au lac on bifurque à gauche, direction l’est. L’est, l’objectif de ma destination. Au moins, je suis déjà orienté dans la bonne direction. Maintenant, c’est – à peu près – tout droit. Mon esprit est clair et sûr. On va suivre la route cyclable qui longe le lac direction Vevey. On roule côte à côte lorsque le trafic le permet, ce qui nous permet de discuter, de tout et de rien. Je suis extrêmement reconnaissant qu’il m’accompagne; partir avec quelqu’un de si cher, même si c’est sur quelques kilomètres, fait toute la différence. C’est comme être lancé à deux mains pour un envol depuis le nid. Une petite poussée morale et physique qui me guide, hopla!
La route du lac est plutôt plate, on garde un bon rythme tout du long. De tout le poids des bagages, ma bicyclette est lourde, posée. J’ai la sensation qu’elle est ancrée sur l’asphalte, comme lourdement connectée à elle, et que je glisse sans effort. Je me sens bien. On arrive rapidement à Vevey, qui se situe à une vingtaine de kilomètres de Lausanne. On arrive sur la Place du Marché et on a décidé de manger ensemble avant de se séparer. Arpad m’invite pour des sushis. C’est drôle comme premier plat de ce voyage, mais c’était délicieux! Je l’accompagne ensuite jusqu’à la gare, où il reprend le train en sens inverse. Une dernière embrassade, et je suis livré à moi-même. Tout content, je roule jusqu’au lac et recommence à le longer, non plus sur la piste cyclable de route, mais sur les quais.
Il y a du monde: des familles, des enfants, des couples. Le monde a l’air heureux de profiter de son dimanche, au bord du lac. Je roule doucement. Les quais à partir de Montreux sont magnifiques: des arbres verdoyants aux allures exotiques ainsi que des fleurs colorées ont été plantées et font resplendir la promenade remplie de touristes (suisses). Air artificiel, mais c’est beau tout de même. Je m’arrête régulièrement pour prendre des photos du lac et des montagnes à son opposé. C’est simplement une vue que j’adore, qui est difficilement inégalable, et une des raisons pourquoi je suis fier d’être Lausannois dans mon cœur. Particulièrement, la lumière embellit ce paysage aujourd’hui.
Je me retrouve ensuite rapidement à Villeneuve, où, dans la forêt, je demande mon chemin à un autre cycliste qui a deux sacoches, en train de faire un petit tour avec sa copine. Il me donne les instructions pour le meilleur chemin à suivre d’après lui: rouler jusqu’à Noville, puis suivre le petit canal jusqu’au Rhône, avant de suivre ce dernier. C’est une belle région. Depuis l’entrée dans la vallée du Rhône, il souffle un vent plutôt chaud et agréable. J’arrive près de Monthey vers 18h30 et remarque sur la carte que sur les prochains kilomètres, il n’y a presque que des zones bétonnées. Je décide donc de chercher un endroit où dormir, je m’approche de la première ferme que je vois et une fois défourché de mon vélo, je croise le fermier à qui je demande s’il aurait un petit bout de jardin sur lequel planter ma tente pour la nuit. Il me dit d’amener mon vélo derrière la ferme et me montre une petite parcelle, et me dit que je peux aussi utiliser le robinet d’eau (froide et chaude) à l’intérieur. Il m’explique que ça risque d’être assez venteux cette nuit; le Foehn souffle, mais se calme d’habitude vers cette heure-ci pour laisser ensuite la place à la Bise, froide mais surtout plus chaotique. Je n’ai de toute façon plus trop le choix, et je vais profiter du Foehn doux qui souffle encore pour monter la tente et m’y abriter. Je le remercie vivement.
Je monte la tente, et me souviens que j’avais perdu des sardines l’année passée. Il va falloir en racheter, mais ce n’est pas si grave. La tente montée, je sors le réchaud pour me faire à manger. Je rencontre des soucis d’ignition et prends plus d’une heure à l’allumer (il faut attendre 5 minutes entre chaque essai que le réchaud refroidisse). Finalement, c’est parce que je ne laissais pas assez de benzine pour le pré-chauffage. Une bonne leçon! Je cuisine ensuite du riz instantané avec un poivron à la sauce tomate. En mangeant, je remarque que les herbes et les épices ne se sont pas mélangées de manières hétérogènes, et je me demande pourquoi car j’ai pourtant très bien mélangé. Un mystère. Sous la tente, je m’occupe de poster les infos concernant mon départ, en ligne. J’aimerais bien ne pas avoir à m’occuper de ça maintenant, mais pour le jour du départ, j’ai plusieurs choses que je voulais poster, simplement pour confirmer mon départ aussi!
Vers 23h, il commence à pleuvoir. Ah, que c’est agréable le son de pluie sur une tente. J’ai l’impression d’être sous une cloche géante, chaque goutte résonnant à l’intérieur de la tente, créant l’illusion qu’il pleut bien plus fort qu’en réalité. J’entends aussi le vent, fort et frénétique. Je m’endors bientôt.
Aphorisme du jour:
Un être vaut mieux que deux tu le seras